Edgar Morin :

Les crises génèrent des forces créatrices.

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Plus que jamais, l’état du monde nous renvoie à la question fondamentale d’améliorer les relations humaines

S’il est probable de voir l’accélération des phénomènes en cours nous mener vers l’abîme, l’improbable réinvention de la société est aussi possible. Car là où croît la désespérance croît également l’espérance. De tout temps, l’humanité a aspiré à l’harmonie.

Les crises ont cette vertu de générer des forces créatrices en même temps qu’agissent des forces régressives. La globalisation constitue à la fois le pire et le meilleur qui soient arrivés à l’humanité : pour la première fois sont réunies les conditions d’un dépassement de notre histoire faite de guerres s’aggravant jusqu’à permettre le suicide global de l’humanité.

En dépit des processus d’homogénéisation qui tendent à détruire les diversités, les métissages culturels se multiplient, accroissant notre conscience d’appartenir à une même terre patrie, sans que cette « patrie » nie les patries existantes, mais au contraire les englobe. Cette conscience constitue le terreau d’un nouvel humanisme planétaire, dont nous pouvons espérer qu’il permettra de faire face à nos problèmes communs – santé, faim, préservation de la biosphère, protection des richesses culturelles, économie soutenable…

Il existe déjà, sur tous les continents,un bouillonnement créatif, une multitude d’initiatives locales,
dans le sens de la régénération économique, sociale, éducationnelle ou éthique. Elles partent de la base, d’initiatives déviantes, marginales, souvent invisibles et dispersées. Elles constituent pourtant le vivier du futur, pourvu qu’elles parviennent à se conjuguer pour
former une voie nouvelle, laquelle ferait reculer l’hégémonie de l’économie et du calcul au profit d’une plus grande solidarité.

 

La métamorphose  n’est possible que par une réforme globale. Changer l’économie ne sert à rien si l’on ne change pas l’éducation ou la santé, mais il faut le faire aussi. Tout est lié. L’objectif n’est plus le développement des biens matériels, de l’efficacité, de la rentabilité, du calculable. Il est à un retour sur ses besoins intérieurs, à la stimulation de nos aptitudes à comprendre autrui, notre prochain et notre lointain, à retrouver un temps long et non chronométré. À nous de travailler à relier, à encourager les initiatives auxquelles nous croyons. À inventer, en marchant, notre propre chemin.

L’important est de connaître le problème humain fondamental. Nous avons longtemps cru que c’était le bonheur. Or le bonheur est fragile, éphémère. Que disparaisse un être aimé et notre bonheur se meurt. Le véritable but, à mon sens, est la poésie de la vie. Il ne s’agit pas de lire des poèmes, aussi magnifiques soient-ils. Mais de vivre dans l’exaltation de soi, dans l’exaltation de l’amitié, de la fête, de la communauté. Par opposition à cela, la prose est ce qui nous ennuie : payer ses factures, perdre sa vie à la gagner. Le politique a oublié nos vérités fondamentales. Mais la société résiste, elle veut de l’amour, des loisirs, de la communion, des apéros géants ! La philosophie de « la voie », c’est de se donner les moyens de réaliser la poésie de sa propre vie. Et, chemin faisant, de ressusciter l’espérance pour générer non pas le meilleur des mondes, mais un monde meilleur.

 

 

Dans Philosophie Magazine n°15, Interview d'Edgar Morin :

"Je retiens de Hegel que la notion de contradiction est au fondement de l'être, de la vie et de la pensée."   (note maliphane : Jung postule aussi que les contradictions nous tiennent debout et sont le fondement de nos êtres)

"Je suis ignoré par les critiques pour qui les écrits sont à étiqueter dans les rubriques "littérature", "philosophie", "sociologie", "histoire", "science" et qui faute de pouvoir m'inscrire dans une de leurs cases, me renvoient dans un no man's land. Moi je me vois à la fois philosophe, historien, sociologue, écrivain, mais je suis chassé de chacune de ces catégories.
Ma façon d'être à gauche est incomprise par les paris et par la tribu des intellectuels de gauche."

"Cataclysme personnel", on lui cache la perte de sa mère à neuf ans :"Cette meurtrissure m'a conduit vers le scepticisme, le doute infini et la fréquentation des auteurs tels que Montaigne, mais aussi ce que j'appelle les tragiques, comme Pascal et Dostoïevski...
Cette souffrance d'enfant m'a aussi rapproché d'une forme de compassion pour la condition humaine. Je n'ai cessé d'osciller entre la négation nihiliste et l'enthousiasme humaniste, de chercher du sens et de douter du sens.

Je suis du côté de la "reliance", cad ce qui relie les êtres, y compris la matrice planétaire, et non du côté de la religion, du salut terrestre ou céleste."
 

 
L'homme porte le mystère de la vie qui porte le mystère du monde.
Plus puissante est l'intelligence générale, plus grande est sa faculté de traiter des problèmes spéciaux.
La connaissance est une navigation dans un océan d'incertitudes à travers des archipels de certitudes
Connaître l'humain, c'est d'abord le situer dans l'univers, non l'en retrancher.
L'intelligence, ce n'est pas seulement ce que mesurent les tests, c'est aussi ce qui leur échappe
L'économie qui est la science sociale mathématiquement la plus avancée, est la science socialement la plus arriérée, car elle s'est abstraite des conditions sociales, historiques, politiques, psychologique, écologiques inséparables des activités économiques.
 

 

 

Edgar Morin est président de l'Association pour la pensée complexe (APC) dont le but est de promouvoir la transdisciplinarité.

Le premier volume de la "Voie" est paru le 20 octobre 2010

 

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