Johnny |
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Une Voix et une Vie pour nos maux |
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Dans le
supplément WE d'un quotidien du soir, un écrivain (Philippe Claudel) va
publier cinq nouvelles sur la foule. (juin 2004).
J'ai
passé toute le journée dans le quartier dans l'attente du soir....Grâce à
un vieux complice, je suis entré avant tout le monde dans la
salle....Alors pour moi tout seul, en le murmurant comme des formules
magiques, j'ai prononcé les quatre sésames du rock'nroll : "One, two,
three, four !".... Ce qui
était palpable aussi c'était, dans l'accroissement de cette foule,
l'accroissement de son bonheur. Plus le nombre augmentait, plus on sentait
le plaisir d'être ensemble, d'être là, si nombreux... C'est si rare cela
aujourd'hui. Pouvoir sourire à l'autre, lui parler sans raison, lui
prendre le bras, sans préambule, sans être rejeté... La musique possède la vertu majeure de nous plonger au coeur, de nous emmener vers la plus profonde des destinations, qui est en nous mais dont il est si difficile de retrouver le chemin. Elle nous isole tout en nous reliant à celles et ceux qui nous entourent. Le paradoxe de son effet est bien là : nous amener en nous-même tout en restant au plus près des autres. Ce n'est pas tant qu'elle nous donne un supplément d'âme, mais plutôt un supplément de vie, de sève, d'electricité, de sauvagerie positive, d'électricité saine, de sang. Je n'ai, il me semble, jamais vu autant de visages heureux que dans tous ces rassemblements majeurs que sont les concerts rocks. Tous ces sourires, tous ces gestes, cette union improvisée et temporaire, qui ne s'assoit sur aucune revendication, aucune récrimination, aucune haine, aucun rejet, aucune dispute, aucun conflit m'ont toujours redonné l'immense confiance dans l'être humain qui parfois me fait défaut. C'est tellement étrange, et le monde, et la vie. Pourquoi rater ce qui nous tend les bras ?... Il est si difficile alors, quand tout s'arrête, de revenir dans le monde, de reprendre pied. La musique construit des parenthèses qui pourraient accueillir les minutes de toute notre vie....Chacun rangeait ses ailes, qui quelques minutes plus tôt, étaient encore déployées. Il fallait aterrir. Goûter de nouveau à la rugueuse réalité...Mes oreilles bourdonnaient. J'avais les jambes en plomb. J'étais aphone à force d'avoir hurlé et chanté. J'étais le plus heureux des hommes... Dehors, le
boulevard était presque désert. Aller dans la ville. Aller dans la vie.
revenir, mais tenter de rester, toujours, un petit peu sauvage. Quelque
part...
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