sommaire                             Witold Gombrowicz
                                                                                        1904-1969

   
 

AUTEURS
Camus,   Nietzsche,   Einstein, Desproges, Wolinski, Lacan, Gracian,  Cioran....

THEMES
l'Amitié, la Confiance, le Pouvoir, l'Ennui
...


PROVERBES DU MONDE.
Africains, Arabes, Allemands, Chinois, Russes, Québequois...


Citations en images

 

Citations
Ses livres préférés
Cours de philosophie en six heures un quart

 

Nait en Pologne ; père homme d'affaires et mère qui vient d'une famille de propiétaires terriens
Prend la campagne et les propiétaires terriens en horreur
En 1920, en pleine guerre russo-polonaise refuse de se laisser enrôler dans l'armée
1923 : entame des études de droit "la matière la plus commode et la plus attirante pour les fainéants"
1926: découvre le midi de la France émerveillé "ivre d'oranges et de vin"; il viendra s'y installer des années plus tard pour y mourir
1937 : " FERDYDURKE"
           Voyage beaucoup à l'étanger, surtout en Italie et en Autriche. Ce qu'il voit lui fait peur. L'Europe est en perdition. "En ces temps d'avant-guerre, les gens devenaient bizarres. Les hitlériens, les communistes se composaient un visage menaçant, la fabrication des fois, des enthousiasmes  et des idéaux égalaient la fabrication des canons et des bombes. Ces années de pré-guerre furent plus ignominieuses peut-être que la guerre elle-même" (Testament)
1939  : Arrive à Buenos-Aires. Y restera vingt-quatre ans.
           Jusqu'à la fin de la guerre, il n'écrit rien et vit dans une misère absolue "Art ! métier d'écrire ! Tout cela était resté dans l'autre                 hémisphère, enfermé à triple tour, mort"
1953 : parution régulière de son journal " lundi , moi. Mardi, moi, etc."
1962 : publie "La Pornographie"
1963 : revient en Europe
1964 : "Cosmos"
1969 : meurt à Vence

Czeslaw Milosz (poète polonais) : "On peut déduire Gombrowicz de Schopenhauer, de Nietzsche  mais également de Dostoïevski; et ces trois évrivains symbolisent la prise de conscience de la crise terrible qui a atteint la civilisation de l'homme blanc au 19ième siècle, et qui annonce peut-être la fin du christianisme."                                            

                                       

Ce n'est pas nous qui disons les mots, ce sont les mots qui nous disent.
Chacun porte son bonheur en soi.
L'homme dépend de l'image de lui-même qui se forme dans l'âme d'autrui, même si c'est l'âme d'un crétin.
Le meilleur remède à nos propres maux est le malheur d'autrui.
Lorsqu'on a vingt ans, on est incendiaire, mais après la quarantaine, on devient pompier.
L'homme réel est celui qui a mal.
Si vous voulez retrouver votre moi, allez chez votre dentiste.

 

Ses livres préférés :

En 1960, le journal berlinois Tagesblatt a publié une enquête internationale réalisée auprès de nombreux écrivains ; y ont participé : John Dos Passos, André Breton, Hermann Hesse. La question était "quels sont les cinq livres qui vous ont le plus influencé ?"

Witold Gombrowicz a répondu :

"1) Dostoîevski. Il ne m'est pas proche personellement. Mon monde, ma forme, ma position se trouvent ailleurs. Apparamment, nous n'avons pas grand chose en commun et pourtant je suis issu de lui (comme nous tous aujourd'hui) en raison de sa volonté d'atteindre l'extrême des potentialités de l'homme. Donc : "Les frères Karamazov".

2) Nietzsche.J'ai souvent été irrité par le ridicule de son surhomme. Je ne partage pas ses opinions. Et pourtant je lui dois -comme à  Dostoîevski - une acuité de vue poussée à l'extrème et aussi -je dois ajouter- un orgueil irrésistible. Et c'est très nécessaire à notre époque où l'inéluctable croissance démographique mène  -contre toute inflation -à la dévaluation de l'homme. Donc "Le gai savoir".

3) Thomas Mann. Le seul écrivain contemporain dont j'aurais voulu baiser la main. Nul n'a exploré aussi profondément mes propres méandres les plus secrets, nul autre n'a su mieux s'adapter à tout changement de mes humeurs. Il importe peu qu'à la lumière des tendances contemporaines, il représente plutôt une magnifique affirmation de l'époque passée : ses anachronismes (même formels) recèlent une organisation spirituelle qui dépasse de loin la pensée et le ton même de la littérature d'aujourd'hui. Mais je ne sais pas trop quoi choisir parmi ses ouvrages qui me semblent tous imparfaits. Disons donc : "La Montagne magique".

4) Afred Jarry. "Ubu Roi". C'est là mon goût personnel, mon caprice, incompréhensible pour ceux qui n'ont pas lu mes livres que l'on commence à publier en Allemagne. Je ne vais pas m'efforcer d'expliquer à quelqu'un qui ne connait pas mon "Ferdydurke" pourquoi je choisi cette " oeuvre " écrite par un blanc-bec de dix-sept ans sous son pupitre d'écolier -livre enfantin, insolent, arrogant, imprégné de légèreté géniale -qui constitue une initiation unique aux mystères de la BÉTISE.

5) André Gide . "Le Journal". C'est que moi aussi j'écris un journal... et seul Gide a entrepris avec le sérieux nécessaire l'élaboration de cette forme si ample et si existentielle, qu'elle l'emportera sans doute sur le récit contemporain. Comme vous voyez : ni Proust, ni Joyce, ni Kafka ni rien de ce qui se fait aujourd'hui. Je me réclame d'auteurs antérieurs car leur mesure de l'homme était plus haute."

 

 

Cours de philosophie en six heures un quart

Ce cours donné du 27 avril au 25 mai 1969  à sa femme Rita et à dominique de roux aide Gombrowicz à supporter les derniers mois de sa vie.
Ces cours furent une idée de Dominique de Roux coauteur de "Testaments" en 1968.
La philosophie fut la grande passion de Gombrowicz avec la musique.
Son objectif est de reconstituer une sorte de généalogie de l'existentialisme en imaginant le dessin d'un arbre généalogique dont le troc était Kierkegaard.
"Pour Marx comme pour Kierkegaard on a besoin de Hegel. Et on n'entre pas dans Hegel sans connaitre "La critique de la raison pure". Qui elle-même tire son origine de Hume en partie, et de Berkeley. en remontant encore plus loin, il serait indispensable de lire au moins Aristote et un peu de Platon, sans oublier Descartes, père de la pensée moderne, ces lectures servant de prolégomènes à la phénoménologie (Husserl) sans laquelle on ne peut lire ni "lêtre et le néant ni "Sein and Zeit".

L'infantilisme et l'immaturité sont étroitement liés au problème de la forme, centrale dans la vision du monde de Gombrowicz.
La forme doit être comprise dans sa double signification : 1) masque que les autres nous imposent et que nous devons garder. 2) comportement auquel nous nous conformons de nous-mêmes pour être acceptés (nous voulons être libre mais nous redoutons plus encore d'être isolés).
Le rapport sujet:objet est étroitement lié au thème de la forme.

"La déchirure la plus profonde de l'homme, sa plaie toujours sanglante, c'est le dilemne sujet-objet. Fondamental. désespérant. le rapport sujet-objet, c'est à dire conscience-objet de la conscience est le point de départ de toute pensée philosophique.
Imaginons le monde réduit à un seul et unique objet, il n'existerait pas. En effet, la conscience est en dehors de tout, elle est l'aboutissement ultime : j'ai conscience de mes pensées, de mon corps, de mes impressions, de mes sensations, voilà pourquoi, pour moi, tout cela existe.
Dès sa naissance, la pensée chez Platon et Aristote se divise en pensées subjective et objective. Par l'intermédiaire de Thomas d'Aquin, Aristote rejoint par des voies diverses notre époque, tandis que Platon , à travers saint Augustin et Descartes, à travers l'aveuglante explosion de la critique de Kant et la lignée de l'idéalisme allemend (Fichte, Schelling, Hegel), enfin à travers la phénoménologie de Husserl et l'existentialisme, connait un épanouissement fulgurant, bien supérieur à celuis de ses origines.
Quant à la pensée objective, elle se voit aujourd'hui concrétisée, exprimée avant tout dans le catholicisme d'une part, dans le marxisme de l'autre. Toutefois, de l'aveu de Marx lui-même, le marxisme n'est pas une philosophie ; quant au catholicisme qui s'affirme comme une métaphysique fondée sur la foi, il est assez paradoxalement la conviction subjective que le monde objectif existe.
Voulez-vous retrouver ces deux-là, subjectivisme et objectivisme, dans le domaine des arts ? Voyez ! la Renaissance n'est-elle pas objectivisme, l'art baroque subjectivisme ? En musique, Beethovenn est subjectif, Bach objectif. Et de grands esprits, des artistes, des penseurs tels qu'un Montaigne ou un Nietzsche, ne se sont-ils pas réclamés du subjectivisme ? Voulez-vous vous rendre compte à quel point cette déchirure dualiste continue à saigner ? Veuillez lire les pages dramatiques que dans "l'être et le néant",  Sartre consacre à une bien étrange question : existe-t-il, à part moi, d'autres hommes ?
Je parle de question "bien étrange". En effet, l'existence des autres est tout de même la plus évidente et la plus tangible des réalités, et pour Sartre, qui est existentialiste, mais aussi marxiste et aussi moraliste, reconnaitre cette réalité comme plausible fut une question de vie ou de mort. Et pourtant, après une profonde analyse du problème, posé dans l'oeuvre de Descartes, de Kant, de Husserl, Sartre se voit obligé d'admettre que pour un raisonnement strictement philosophique l'existence de l'autre est formellement inacceptable. Pourquoi ? parce que, dans mon essence absolue, je suis comme on l'a vu, un pur sujet...Et si j'admettais qu'un autre homme est également une conscience, alors pour cette conscience-là, étrangère, je deviens à l'instant même un objet, donc une chose. Or, pour un raisonnement strict, il ne saurait y avoir deux sujets, un sujet excluant forcément l'autre.
Quant aux ignorants qui considèrent la philosophie comme un tas de balivernes parce qu"ils n'y comprennent goutte, je leur ferai remarquer que c'est sur une contradiction analogue que se cassent la tête les physiciens modernes qui butent sur la théorie ondulatoire et corpusculaire de la lumière, sur la conception dualiste de l'électron, le continuum d'Einstein, la théorie de Planck. Partout, de tout temps, la pensée la plus profonde se brise contre le récif de la dualité d'interprétation qui, sur le plan intérieur, se révèle aussi inconciliable qu'insoluble. Voilà pourquoi l'homme est pour lui-même un tel mystère. Et pourtant, pour les penseurs sarmates, ce problème n'est que broutille, lubie et nébuleuse, inventées à la juste mesure des snobs et autres beaux esprits égocentriques de la même espèce.
Or chose singulière, la même contradiction apparaît lorsque nous essayons de comprendre ce que c'est que la conscience pure, en soi : la conscience, en effet, ne peut être que conscience de quelque chose, elle est corrélative ; si je peux prendre concscience des formes de cette table-ci, ou des mouvements de cette vache-là, on ne peut imaginer une conscience indépendante de son objet, car étant conscience, elle prend justement consicence de quelque chose. Dans ce cas-là, la loi d'identité (A égale A) n'est plus valable : notre pensée se heurte à nouveau à une contradiction essentielle et insoluble, et nous débouchons sur la formule existentielle  qui fait ressortir l'étrange et fondamentale "esquive" qui a lieu en nous, l'impossibilité d'appréhender l'être humain, "l'homme étant ce qu'il n'est pas, et n'étant pas ce qu'il est".
Voilà dans les grandes lignes, comment apparait le "menu" problème du subjectivisme qui, à bien des "têtes molles", semble n'être que "contemplation égoiste de son propre nombril" et "embrouillamini".
Pour ces "têtes molles" si embrumées, tout n'est bien sûr, que trouble et brume. Or ce problème de rien du tout, cette difficulté minuscule domine en fait toute la culture contemporaine. Mais voilà, les "têtes molles" ne sont même pas capables de comprendre que leur combat contre le marxisme est précisément celui que le subjectivisme est en train de mener contre l'objectivisme. Pur produit de la science, le marxisme tente en effet par des moyens scientifiques, c'est à dire objectifs, d'organiser la collectivité : il s'affirme comme une théorie abstraite qui se sert de concepts abstraits et c'est "de l'extérieur", pour ainsi dire, qu'il appréhende l'homme.
En revanche, celui qui défend son univers intérieur, sa liberté, sa vie privée, se range par là même du côté du subjectivisme.
Pour conclure, voici encore un dernier exemple qui rendra plus claire la différence entre objectivisme et subjectivisme. le chirurgien qui enlève l'appendice d'un malade considère celui-ci comme un objet, opérable exactement de la même manière qu'on répare une auto ou un quelconque engin ; il s'agit là d'une mécanique qui fonctionne mal. Cependant le patient qui vit l'opération dans sa chair même voit la chose d'un oeil différent : c'est là son affaire personnelle, bien distincte et unique, c'est "son" opération à lui."

 

Descartes : une seule idée importante : le doute absolu
Ici commence le rationalisme : soumettre tout au doute absolu, jusqu'au moment où la raison oblige d'admettre par force une idée.

Kant :
Kant démontre que notre raison ne suffit pas à découvrir ce qu'il appelle le numen. Par exemple, si vous voyez un objet, vous avez l'impression que c'est un objet blanc fait d'une certaine façon, etc. Mais il suffit de mettre des lunettes jaunes pour que tout change. Imaginez une fourmi qui regarde le même objet et ne le voit qu'en deux dimensions et non trois. Or, pour une fourmi ou pour une personne qui met des lunettes jaunes, l'objet changera.
Kant se demande si la raison pure peut découvrir l'objet en soi, objectivemment, indépendamment de nos façons de le percevoir. Il constate que c'est impossible, nous ne pouvons jamais savoir ce qu'est le numen, l'absolu, en soi, indépendamment de nos perceptions. Nous sommes limités au monde phénoménologique. C'est une chose importante puisque vous trouverez ce problème chez Husserl, Hegel...